Miel de Narbonne
Miel monofloraux du Languedoc-Roussillon
Les auteurs
Fiche réalisée par 3 élèves de 1ère STAV AV du lycée agricole Marie Durand de Nîmes-Rodilhan, aidés de leurs professeurs d'Agronomie et d'Économie à la suite d’un « stage territoire » de découverte de la garrigue du « Pays garrigue-costières de Nîmes » (stage encadré par les professeurs d'Économie, Éducation socio-culturelle, Histoire-Géographie).
Fiche relue par le Groupement Qualité Miels du LR.
Description
Le miel de Narbonne est un miel de romarin très fin, avec une teneur en eau très faible. L’appellation miel de Narbonne ne bénéficie d’aucune protection par un signe de qualité officiel. Elle est aujourd’hui peu usitée, à l’exception des ventes réalisées dans la région de Narbonne. Les apiculteurs préfèrent parler de miel de romarin. Les miels de Narbonne peuvent bénéficier de la marque collective « Pays Cathare », un label visant à promouvoir le patrimoine et le savoir-faire en Pays d’Aude.
C’est un miel monofloral ou miel de cru, c’est-à-dire un miel issu en grande partie d’une seule variété de fleurs. Il est très clair, limpide à la récolte et devient blanc irisé de jaune pâle et de gris lorsqu’il est cristallisé (cristallisation spontanée)
Dans la pratique, il est impossible de certifier que les abeilles n’ont butiné qu’une seule sorte de fleurs. On considère donc que le miel est monofloral s’il a une dominante marquée (à plus de 45%). D’autres miels mono floraux (appelés aussi miels de cru) proviennent des zones de garrigues du Languedoc-Roussillon : miel d’arbousier, miel de lavande (dans la partie Est de la région), miel de miellat de Metcalfa, miel de Buplèvre.
Dans la zone des Cévennes, on trouve aussi des miels monofloraux : miel de rhododendron, miel de bruyère blanche, miel de bruyère cendrée, miel d’acacia, miel de châtaignier.
Certains miels polyfloraux sont composés en partie de romarin (voir fiche Miel des Cévennes et miels polyfloraux de Languedoc-Roussillon).
Historique
Le miel de Narbonne est connu depuis l’Antiquité. Les romains le considéraient déjà comme le meilleur miel du monde. Du XIIème au début du XXème siècle, il fut le plus célèbre des miels. Au XIIème siècle, le Roman de Guillaume s’enthousiasme « Nulle part ne trouve-t-on miel meilleur qu’à Narbonne ». A cette époque, ce miel Blanc était exporté au loin (jusqu’en Egypte et Constantinople).
En 1770, le Dictionnaire Portatif du Commerce le décrit comme ayant « un goût doux et piquant, d’une odeur douce et peu aromatique ». « L’excellence de ces miels », poursuit l’auteur, « vient à ce qu’on prétend, des romarins qui sont abondants et très communs dans cette contrée ». Cependant, nombreuses sont alors les localités, parfois très éloignées, alentours qui vendent leur miel sous cette célèbre étiquette.
Ainsi, la production principale vient des Corbières, mais certains miels peuvent provenir de Rivesaltes (dans les Pyrénées-Orientales d’aujourd’hui).
Au début du XXème siècle le paysage apicole se transforme. L’extension de la vigne dans l’Aude entraîne le déclin de l’apiculture. Ce déclin se poursuit jusqu’à nos jours. Ne bénéficiant plus de son antique réputation, le miel de Narbonne ne trouve guère de place hors des frontières de la région. Cependant, les miels de cru connaissent un développement car l’apiculture professionnelle s’est modernisée favorisant ainsi l’installation de jeunes : transhumance pour suivre les miellées selon les territoires, passage facile des zones de garrigues aux zones de montagne, utilisation de ruches à cadres qui permettent de récolter plus de miel, vente d’autres produits de la ruchée comme la gelée royale ou la propolis…
Terroirs et productions
Le miel de Narbonne est récolté dans l’Aude plus particulièrement dans les Corbières et le massif de la Clape. La très grande concentration du romarin dans les Corbières maritimes, ainsi que leur floraison très précoce, notamment dans les cantons de Sigean et Durban au sud et sud-ouest de Narbonne, expliquent la spécificité de ce miel.
Sur les 1 500 tonnes de miel produites chaque année en Languedoc-Roussillon, 19% le sont dans l’Aude. Une partie de ce tonnage correspond donc à du miel de Narbonne.
Il y a peu d’apiculteurs professionnels (c’est-à-dire ayant plus de 150 ruches), même si, avec 6% d’apiculteurs professionnels soit 200, le Languedoc-Roussillon est la deuxième région la plus professionnalisée de France. Ces apiculteurs professionnels détiennent 55% du cheptel de la région et produisent 70% du miel. On estime à près de 3 200, les apiculteurs amateurs de la région.
Dans l’Aude, il y a environ 400 apiculteurs dont 30 professionnels. Ces apiculteurs sont des producteurs potentiels de miel de Narbonne, mais la production reste confidentielle.
Savoir-faire
Outre les apiculteurs audois, des apiculteurs d’autres zones de la région peuvent aussi produire du miel de Narbonne en pratiquant la transhumance de leurs ruches.
On trouve des fleurs écloses de romarin pratiquement tout l’hiver, mais la grande floraison commence avec les premières journées « printanières » (en février-mars) et se poursuit jusqu’en avril-mai. La récolte varie d’une année à l’autre en fonction des conditions climatiques : plus la floraison est intense et concentrée dans le temps, meilleure sera la production. A l’inverse si la floraison est précoce et irrégulière la récolte sera minime.
Les abeilles reprennent leur travail en automne pour leurs provisions d’hiver. Autrefois, le miel de Narbonne était récolté pour la Saint-Jean (24 Juin) qui correspond à la fin de la miellée de printemps. Les apiculteurs ne faisaient alors qu’une récolte par an car les ruches à cadre amovible n’existaient pas. Aujourd’hui, les apiculteurs récoltent d’abord (fin avril début mai) un miel de romarin pur, ensuite fin juin, ils récoltent un miel de Corbières ou de garrigue plus foncé et corsé en goût car issu de romarin et d’autres fleurs (voir fiche Miel des Cévennes qui traite aussi des autres miels polyfloraux).
L’ancien miel de Narbonne devrait être entre les deux (romarin essentiellement mais aussi thym, cistes et autres essences mellifères de garrigue).
Pour récolter un miel monofloral (miel de romarin par exemple), l’apiculteur place ses « hausses » sur ses ruches, juste au moment de la miellée de la fleur recherchée et les retire juste après pour la récolte. Sur ces hausses sont positionnés des cadres amovibles avec des alvéoles dans lesquelles les abeilles vont bâtir leurs rayons. Elles butinent le nectar des fleurs arrivées et le déposent dans les rayons. Les abeilles ouvrières vont sécher ce nectar en le ventilant, jusqu’à évaporation des 2/3 de l’eau et formation d’une fine couche de cire.
L’apiculteur intervient quand les trois quart des alvéoles sont operculés. Il retire les cadres de ses ruches et les emporte dans son atelier d’extraction. Il procède alors à la désoperculation avec des instruments spécifiques puis extrait par centrifugation le miel contenu dans les alvéoles. Celui ci sera filtré avant d’atteindre le maturateur où il repose 4 à 5 jours à 20°C avant conditionnement en pots de poids variable (250 g, 500 g, 1 kg).
Usages
Tous les usages habituels du miel existent dans la région, mais on peut signaler son emploi dans plusieurs pâtisseries (comme les croquants). Quelques Fêtes du Miel existent depuis peu (ateliers de cuisine, dégustations, découverte de la ruche..), comme par exemple à Cournonsec dans la périphérie de Montpellier ou à Saint-Michel-des-Llots dans les Pyrénées-Orientales.
La vie des abeilles passionnant les enfants, des apiculteurs (comme le Groupement Qualité Miels Languedoc-Roussillon...), proposent des visites de leurs ateliers. Certains ont même mis en place un Écomusée (à Tautavel…), ou se sont équipés de ruches de démonstration, transparentes.
Préparer, Cuisiner, Déguster
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Recettes gourmandes
Pommes pochées au safran et au miel de Narbonne
Ingrédients :
- 5 pommes belles de Boskoop
- 2 oranges
- 1 citron
- 8 cuillères à soupe de miel de Narbonne
- 1 dosette de safran
Préparation :
- Pressez les oranges et le citron, Versez le jus dans une casserole de grand diamètre, puis ajoutez le safran et le miel liquide.
- Portez sur feu vif et faites bouillir.
- Pelez les pommes, coupez-les en quatre et éliminez les cœurs.
- Immergez les quartiers de pommes dans le sirop safrané et laissez-les pocher sur feu doux pendant 10 min environ.
- Eteignez le feu, retirez les pommes à l'aide d'une écumoire et répartissez-les dans des coupelles.- Faites bouillir le sirop à gros bouillons pour qu'il réduise de moitié. Arrosez-en les fruits.
- Laissez refroidir, puis placez au réfrigérateur.
- Dégustez ce dessert très frais.
- Avant de servir, vous pouvez le décorer avec des amandes effilées grillées.
Salade de fruits frais au miel de romarin
- Couper des fruits frais de saison (pêches, melon, cerises, abricots…) en petits morceaux dans un saladier.
- Ajouter 1 ou 2 cuillérées de miel de romarin selon votre goût.
- Remuer et placer au réfrigérateur deux heures avant de servir.
Ce dessert peut aussi être réalisé avec un seul fruit
Pizza au miel de romarin
A la sortie du four de votre pizza au chèvre « maison », rajouter une cuillère à café de miel de romarin sur les fromages et déguster.
SOURCES
- Visites du marché de producteurs de Nîmes, et du « Rucher Fournésan » à Fournès,
- « Inventaire du patrimoine culinaire de la France, Languedoc-Roussillon, produits du terroir et recettes traditionnelles », éditions Albin Michel/CNAC, 1998,
- Groupement Qualité Miels du Languedoc Roussillon,
- ADAPRO-LR, www.thebeecity.com
- Histoire : source principale, inventaire CNAC cité ci-dessus, dans lequel figurent les auteurs et ouvrages mentionnés
PHOTOS
Romarin ; Pot de miel : Fotolia ; Abeille sur romarin ; Gouffre de l’oeïl doux dans le massif de la Clape : Lycée Agricole Marie Durand Rodilhan ; Apiculteurs : Le Rucher de Fourmésan"