Lamproie

Les auteurs
Cette fiche a été rédigée par MARTIN V. REIGNIER T. et HUGON M. : élèves de la classe de Bac technologique STAV du LEGTA de Bazas « Terres de Gascogne »
Contributeurs : GUERLESQUIN C.
Présentation
Les Lamproies sont des vertébrés primitifs qui, depuis près de 400 millions d’années, n’ont subi aucune évolution !
On les connaît sous de multiples appellations : Lamprèse, Lampreyre, Pourade (Landes), et en langage populaire : Fifre, Flute, Suce-pierre, Sept-œil, Sept-trous, Vampire des abysses.
La Lamproie Marine (Petromyzon marinus) est anguilliforme, à peau nue, sans écailles, lisse et visqueuse. Elle est de couleur brun jaunâtre, marbrée de noir, le ventre, presque blanc. Sans mâchoire, elle possède un disque buccal à ventouse garni de dents. Elle mesure entre 60 cm et 1 m de long et pèse de 0.7 à 2 kg (le mâle étant plus petit que la femelle).
Les Lamproies sont des migrateurs nés en eau douce, qui achèvent de grandir en mer, puis reviennent en eau douce pour se reproduire.
Elles déposent leurs œufs dans un nid qu'elles creusent dans les galets. Les larves passent 3 à 5 ans dans les fonds, se nourrissant de plancton et de petits vers. Les jeunes redescendent vers l’océan et se fixent sur des poissons (morues, églefins, saumons) qu’elles parasitent, se gorgeant de leur sang.
Après 2 à 3 ans en mer, les adultes remontent les cours d’eau, en hiver et au printemps (de novembre à mai), pour se reproduire (période où on les pêche). Epuisées par le périple, la reproduction et la ponte, elles finissent par mourir.
Il existe de nombreuses espèces de Lamproies Marines. Deux autres espèces, de plus petite taille, colonisent les eaux en France : la Lamproie de rivière (Lampetra fluviatilis) et la Lamproie de planer (Lampetra planeri). Malgré leur abondance la pêche est réglementée.
Historique
La pêche dans l’estuaire est une activité pratiquée sans doute bien avant le Moyen-Âge.
Au XIIème siècle, Robert Etienne nous apprend que des Lamproies par douzaines constituent les redevances de la dépendance de Lanton au Chapitre de Saint-Seurin à Bordeaux.
Au début du XVème siècle, selon Puig, la Jurade de la ville réglemente la vente de la Lamproie, qui doit se faire au marché et non directement dans les maisons. Nos historiens constatent encore qu’il en part en barils pour l’Angleterre. Elle y est sans doute appréciée comme « poisson » de choix.
Au XVIème siècle, on la retrouve aux côtés du saumon et de l’alose dans les vivres de la maison d’Albret. Son prix est alors calculé en fonction de la longueur et non du poids. À Agen, le dimanche de la passion, le « Prescheur de la ville » et « monsieur l’Assesseur » en reçoivent une en cadeau.
En 1793, elles figurent en tout cas sur les marchés de Gironde et du Lot-et-Garonne.
Elles semblent connaître une certaine désaffection au début du XIXème siècle, mais l’engouement pour le terroir et les cuisines régionales leur redonne un attrait certain. Les étuvées de Lamproie dites « À l’angevine » (aux pruneaux), apparaissent sous la plume de Courchamps dans sa Néophysiologie du Goût en 1839, et les Lamproies Bordelaises aux poireaux sauvages et au vin rouge jeune, dans Le Triple Almanach Gourmand de Ch. Monselet en 1867.
Terroirs et production
* On pêche la Lamproie adulte au moment de sa migration lorsqu’elle remonte les fleuves d’Aquitaine (Adour, estuaire de la Gironde, Garonne et Dordogne) pour venir frayer en eau douce.
* Le nombre de pêcheurs professionnels diminue alors que la Lamproie marine abonde dans la Garonne, l’Isle, la Dordogne (la pêche braconnière est non négligeable). La production est variable selon les années, mais importante. La pêche est autorisée du 1er Décembre au 15 Mai.
* Situé au cœur de la Gironde, le village de Sainte-Terre comptait en 2012 quatre producteurs et abritait le « Jardin de la Lamproie ». On y fête la Lamproie depuis 1990, à la fin du mois d’avril.
La Confrérie de la Lamproie œuvre pour alimenter le regain d’intérêt à l’égard de ce produit de terroir.
Savoir-faire
* Les pêcheurs professionnels dans l’estuaire capturent les Lamproies avec différents filets. Le volant flotte en surface, tenu à la main par le pêcheur en place dans une embarcation à fond plat (« plate »). Le filet semi coulant est lesté plus ou moins en profondeur par des plombs, et le filet de plein fond traîne au fond.
* Dans les zones « mixtes » et fluviales comme sur la Dordogne et la Garonne, la Lamproie est aussi pêchée grâce à des nasses en plastique (traditionnellement en osier et appelées « bourgnes »), relevées tous les deux jours en début et en fin de saison, et tous les jours lors des pics de capture. Une fois pêchée elle est transférée dans des viviers.
Usages
La préparation de la Lamproie repose sur un véritable « rituel ». Plat traditionnel de fête, elle est consommée cuite au vin rouge du cru.
Sa chair se singularise par l’absence d’arêtes (ce n’est pas un poisson !). Assez fade, elle s’imprègne des parfums du lard, et des braises (si elle est grillée), ou de ceux plus subtils du vin et de l’Armagnac quand elle est préparée à la bordelaise.
Très appréciée en Aquitaine, la Lamproie à la Bordelaise est souvent commercialisée en bocaux.
S’attaquer à cuisiner la Lamproie demande du courage, (son sang sert à la préparation, et l’opération de nettoyage et de découpage est fastidieuse), de la patience, et un certain savoir faire.
Préparer, Cuisiner, Déguster
-
Recette gourmande
La Lamproie à la bordelaise
Ingrédients
- 1 lamproie de 1 kg vivante ;
- 8 poireaux.
- 1 bouteille de Bordeaux rouge.
- 1 tranche épaisse de jambon de Bayonne.
- 30 g de beurre.
- 30 g de farine.
- 3 oignons.
- 2 gousses d'ail.
- 1 bouquet garni.
- 15 cl d’Armagnac.
- Sel et poivre du moulin.
Préparation
- Pendre la lamproie par la tête et lui sectionner la queue afin de récupérer le sang dans un grand bol avec un fond de vinaigre.
- Ebouillanter la lamproie et râcler la peau afin d’enlever le mucus très caustique (sinon elle est immangeable).
- Couper le poisson en tronçons de 5 cm, en retirant bien le nerf central de chaque morceau, les viscères et les ovules ou la laitance.
- Faire revenir vivement à la poêle les morceaux de lamproie. Egoutter. Réserver.
- Nettoyer les blancs de poireaux. Les couper en rondelles. Les faire blanchir.
- Eplucher et émincer les oignons. Hacher l’ail. Couper le jambon en dés.
- Dans une cocotte, faire revenir 5 minutes le vert des poireaux, les oignons, l'ail haché et le bouquet garni.
- Faire un roux : ajouter la farine en pluie. Mélanger soigneusement.
- Faire bruler le vin rouge et le verser. Porter à ébullition. Ajouter le jambon et les blancs de poireaux blanchis. Saler et poivrer.
- Couvrir et laisser mijoter 1 heure à 2 heures.
- Réchauffer les morceaux de lamproie avec les blancs de poireaux.
- Servir dans un plat chaud, accompagné de croûtons frottés d'ail.
SOURCES
- visite du musée de la Lamproie à Sainte Terre, rencontre avec un pêcheur
– documentation de l’IRSTEA de Bordeaux
– inventaire Aquitaine du CNAC chez Albin-Michel
- Relecture et validation : M. CASTELNAUD - IRSTEA de Bordeaux et Le musée de la Lamproie à Sainte Terre
- Ressources et sites utilisés : www.federationpeche.fr ; www.Wikipedia.org/lamproie ; www.cuisinealafrancaise.fr ; www.Cocin’art.fr
- Biodiversité CEMAGREF de Bordeaux (irsta) : pêcheurs en Gironde
- Le festin n°35-36, pp109-115
- Le Républicain 26 avril 2012- Jean Louis Beaucaillou, pêcheur professionnel sur la Garonne, un pro. de la Lamproie.
CREDIT PHOTOS
- La Lamproie marine : http://www.20minutes.fr/planete/711533-planete-la-lamproie-grouille-eaux-dordogne-garonne
- Lamproie à la bordelaise : Fotolia